Bonjour!
Voici l'homélie de l'abbé Simon-Pierre Pelletier,
curé de la Cathédrale de Sainte-Anne
Fête nationale des Québécois / Saint-Jean-Baptiste...
Merci!
Merci!
la fête d'aujourd’hui est une fête de la mémoire, d’une histoire.
La fête de la St-Jean Baptiste, en effet, a, pour les Québécois que nous sommes, une dimension historique très importante. Pendant des années, à l’occasion de cette fête, on a célébré ce qui fait le coeur d’un peuple, d’une nation: sa langue, sa culture et sa foi; trois dimensions enracinées dans son histoire et indissociables les unes des autres.
Avec le temps, on en est venu à ne plus trop savoir pourquoi on fêtait. Heureusement on recommence à prendre contact avec nos racines et notre histoire.
Ce n’est pas facile. Les trois dimensions qui font l’histoire d’un peuple doivent être associées si on veut faire l’histoire, or elles le sont de moins en moins. La langue est souvent mal parlée et mal écrite au point qu’on doive donner des cours de base en français aux étudiants universitaires.
La culture est attaquée par la corrosion: nous ne sommes qu’un petit peuple cerné de toute part par les cultures américaines et anglaises qui ont les moyens de nous inonder de leurs produits culturels: chants, films, musique etc..
La vie de foi est en crise chez nous. On le dit de toutes les manières : beaucoup dans notre société n’ont pas de culture religieuse et sont souvent indifférents à leurs racines religieuses ou ont perdu le feu sacré qui montent de leurs racines.
Attention ! Je ne suis pas en train de faire une crise de pessimisme. Car s’il y a une crise des valeurs dans notre société, il y a aussi un éveil aux valeurs. Parce que vivre une crise c’est toujours questionner ses valeurs. Et les dernières années nous ont permis d’assister à un éveil aux valeurs propres à notre culture. Je le dis surtout en constatant le l’intérêt soulevé par notre fête nationale.
D’une certaine manière ce que nous vivons comme peuple n’est pas étonnant. Nous nous sommes donnés un patron, St-Jean-Baptiste, qui
a dérangé l’histoire. Grâce à lui l’histoire Sainte n’a pas été la même. Il est probablement en train de nous faire découvrir qu’être un peuple enraciné dans sa culture, sa langue et sa foi, cela ne veut pas dire être un peuple immobilisé, paralysé; cela ne veut pas dire être un peuple qui ne fait que répéter l’histoire.
On peut être enraciné tout en créant l’histoire. Il n’y avait plus enraciné dans sa foi
que Jean-Baptiste, pourtant il a créé, il a été original. C’est même ainsi que l’histoire a conservé l’image de Jean-Baptiste: il était original. Et c’est vrai, car le mot original signifie d’abord que l’on est à l’origine de quelque chose, donc que l’on crée.
Je suis certain que notre patron ne nous en voudra jamais si nous décidons d’être original dans notre histoire.
Quand le grand Rabin Israël Baal Shem Tov voyait le danger qui menaçait ses ouailles, il avait l’habitude de se réfugier à un certain endroit de la forêt pour méditer. Alors il allumait un feu, il disait une prière spéciale et le miracle se produisait: le danger était évité.
Plus tard, quand un de ses disciples, un rabin célèbre, avait à intercéder auprès de Dieu dans une situation semblable, il se rendait au même endroit de la forêt et il disait :“Maître de l’Univers, entends-moi! Je ne sais pas comment allumer le feu mais je connais la prière.” Et le miracle s’accomplissait.
Plus tard encore, un autre rabin, pour sauver son peuple une fois de plus, allait dans la forêt et disait:“Je ne sais pas comment allumer le feu, je ne connais pas la prière, mais je connais l’endroit et ça doit être suffisant.”
Enfin il advint au Rabin Israël de Rizhn d’avoir à vaincre un grand danger. Assis dans sa chaise, la tête dans les mains, il s’adressa à Dieu :“Je suis incapable d’allumer le feu, je ne connais pas la prière et je ne sais même pas où se trouve l’endroit dans la forêt. Tout ce que je puis faire, c’est de raconter l’histoire. Est-ce suffisant?” Et ce fut suffisant.
Dieu a fait l’homme, car il aimait les histoires. Cette histoire qui a été raconté par Jean Monbourquette que certains connaissent, illustre bien ce que je disais.
Depuis quelques années comme collectivité nous avons oublié et laissé tomber bien des choses de notre histoire. Ce que nous avons gardé est-il suffisant? Garderons-nous une prière de confiance au Seigneur? Pouvons-nous au moins raconter l’histoire? Si nous le pouvions ce serait sans doute suffisant comme le démontre la métaphore du rabin. En effet, quand nous racontons l’histoire, nous créons aussi l’histoire; car l’histoire en nous faisant prendre contact avec nos racines nous propulse vers en avant comme une plante que les racines forcent à sortir de terre et à être une nouvelle plante. Amen.
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