dimanche 31 mai 2009

L'Esprit de la Pentecôte

Bonjour,

Pour ce jour de la Pentecôte, Patrick Dubois, notre ami-correspondant-diacre de France m'a fait parvenir ce texte magnifique d'un prêtre de la Mission de France; merci Patrick. J'en fais profiter mes amis lecteurs.


Une brèche pour l'Esprit

Les disciples de Jésus se sont terrés comme des rats.Pas question de passer par les portes : elles sont « verrouillées » par la peur.
Dans une atmosphère qui sue l'angoisse « car ils avaient peur des Juifs... », ces gens sursautant au moindre bruit, ces naufragés sur leur radeau, ces évadés pris au piège, ces condamnés à mort en sursis, ces regards de chiens battus, ces chrétiens inquiets, ces croyants sous la crainte, cette religion de la peur, chuchotent dans l'ombre.
Cette petite poignée de gens ne sont plus que des rescapés. Ce sont les derniers témoins d'une aventure qui est terminée et qui s'est mal finie. Il ne leur reste plus pour survivre que ces quelques mètres carrés coincés entre quatre murs : c'est leur seul héritage. Ils n'ont que des regrets à respirer et des souvenirs pour se nourrir. Leur cachette est une prison, leur maison est un tombeau.
Celui sur qui ils avaient tout parié s'est fait prendre, trahir et torturer. Tout est raté, ce n'est même pas glorieux, tout juste lamentable.Jésus est mort.
Or, « Jésus vient et il était là au milieu d'eux... »Il n'y a pas de transition, pas de parenthèse. Dieu est urgent. La vie n'attend pas.
La résurrection est toujours une naissance, un arrachement, une déchirure.La résurrection ne prévient pas, elle ne règle pas par mensualités, elle ne fut pas de plan d'épargne, elle n'a pas de check-list. On ne planifie pas l'action de l'Esprit, elle est soudaine. Il leur dit : « Recevez le Saint-Esprit... »
Du coup, le monde cesse de se regarder dans la glace en se prenant pour son image. Le monde ouvre les fenêtres et tire les rideaux. Il v a une brèche et, par cette brèche, le monde recommence.
Les derniers rescapés de l'aventure morte deviennent les premiers témoins de la naissance. Les derniers sont les premiers. Ce n'est plus la fin d'un monde, mais le début d'un autre. C'est quand il est achevé que l'Evangile commence. Les disciples ne sont plus des fuyards, mais des envoyés : « Moi aussi, je vous envoie...
La porte verrouillée devient un chemin, la prison devient route de liberté, les traqués de la peur « sont remplis de joie... ». Et pourtant ce sont bien les mêmes gens, les mêmes pauvres, les mêmes pauvres hommes et les mêmes pauvres femmes. Les mêmes et pourtant tellement différents. Ce sont les mêmes, mais ils sont devenus tellement autres.



C'est une Pentecôte.« Recevez l'Esprit Saint... »C'est la Pentecôte.
Ouvrir une porte, c'est oser affronter une distance, une nouveauté, un nouvel espace, un courant d'air, un inconnu qui n'a pas encore de visage. Je sais seulement qu'il frappe à la porte et qu'il attend.
Ouvrir la porte, ce sera précisément lui donner un visage. C'est un pari.Une rencontre sera toujours un risque. L'Esprit est ce risque.
Ceux dont la porte est verrouillée sont ceux qui ont supprimé ce risque.Ils sont tellement bouclés sur eux-mêmes qu'ils sont à eux tout seuls un univers.
Ils n'ont plus de problèmes de frontières parce qu'ils n'ont plus ni portes, ni fenêtres, seulement des miroirs où ils ne se lassent jamais de se prendre pour le monde entier.



Contrairement à ce qu'on cherche à lui faire dire, l'Esprit Saint ne supprime pas les frontières : il les ouvre et il en crée de nouvelles. Il y a encore trop de gens qui rêvent de standardiser l'unité du monde à partir d'une production à la chaîne, où tout le monde sortirait du même moule, sur le même modèle.
C'est sûr qu'avec de bons sentiments et un peu d'ambiance on peut se sentir « proches » ou « unis », mais on ne fait jamais que tricher avec les distances. Déjà ceux de Babel voulaient supprimer les distances. Babel, c'est le contraire de la Pentecôte.
Ceux qui parlent si bien de « totaliser » le monde sont généralement des « totalitaires ».L'Esprit n'est pas celui d'un système.L'action de l'Esprit, c'est le différent.Si je veux rencontrer l'autre, c'est dans la mesure où il n'est pas moi !



« Il souffla sur eux et leur dit : "Recevez l'Esprit Saint...". »

(Jean Debruynne, prêtre de la Mission de France))

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